Sexologue à Montauban, je remarque que les jeunes s’adonnent à des pratiques sexuelles « extrêmes » sans en comprendre les risques.
Au cours des dix dernières années, les comportements sexuels qui étaient autrefois rares et principalement observés dans les petites communautés adeptes du kink ou du BDSM sont devenus beaucoup plus courants. Aujourd’hui, de nombreux jeunes s’adonnent à des formes de « sexe violent », telles que l’étranglement, les cheveux tirés et les gifles, à des taux jamais observés auparavant par les chercheurs. Des enquêtes suggèrent que 40 à 75 % des jeunes adultes déclarent avoir pratiqué au moins une de ces activités.
Lorsque ces pratiques étaient principalement limitées aux communautés adeptes du kink, les gens les apprenaient souvent dans des contextes où le consentement, les limites et la sécurité étaient ouvertement discutés. Les participants avaient tendance à savoir ce qu’ils aimaient, ce qu’ils n’aimaient pas et comment en parler. Maintenant que le sexe violent est devenu courant, de nombreux jeunes s’y adonnent sans avoir cette expérience préalable et sans les facteurs de protection qui peuvent rendre ces expériences plus sûres.
Comment les gens en prennent-ils connaissance ?
Pour de nombreux jeunes, leur première exposition à ces comportements provient de la pornographie, des réseaux sociaux ou de conversations avec des amis. Dans la pornographie, le sexe violent est montré sans aucune discussion sur le consentement ou la sécurité. Des recherches montrent que les hommes sont plus susceptibles de voir ces actes dans la pornographie, tandis que les femmes en entendent souvent parler par des amis ou les voient dans des mèmes ou des publications en ligne. Dans les deux cas, ce qui manque, ce sont des informations sur la manière de parler des limites ou d’assurer la sécurité de chacun. Cette tendance ne concerne pas seulement la pornographie : à mesure que la société accepte davantage la diversité sexuelle, les pratiques qui étaient autrefois stigmatisées sont devenues plus visibles. Les romans d’amour et les fictions érotiques destinés aux femmes ont également popularisé le sexe violent, mais là encore, ils montrent rarement la communication en coulisses qui le rend plus sûr.
Pourquoi les gens pratique le « Rough Sex »
Les jeunes disent souvent qu’ils trouvent ces activités excitantes, différentes et sexy. Pour la plupart, il ne s’agit pas d’agressivité ou d’envie de faire du mal à leur partenaire. Mais les intentions ne garantissent pas la sécurité. Sans communication claire, ces rencontres peuvent facilement franchir la ligne et devenir des agressions sexuelles. Partout dans le monde, des affaires judiciaires sont portées devant les tribunaux dans lesquelles le sexe violent, en particulier l’étranglement, est au centre des débats.
Un cadre à établir entre les partenaires
Aux USA, la National Coalition for Sexual Freedom et l’American Law Institute ont récemment créé des lignes directrices pour aider la loi à faire la distinction entre le sexe pervers légal et l’agression. La clé est le Explicit Prior Permission (EPP). Cela signifie :
- Un consentement clair et éclairé de la part de participants sobres
- Discuter des limites et de ce qui est acceptable avant que quoi que ce soit ne se passe
- Avoir un moyen d’arrêter l’activité pendant les rapports sexuels
La pornographie et les réseaux sociaux n’apprennent pas aux jeunes à gérer ce que j’appelle le « sexe de niveau universitaire », dans lequel les limites sont repoussées. À mesure que nous acceptons des pratiques sexuelles plus diverses, nous devons également enseigner comment les aborder en toute sécurité. Les tactiques alarmistes et la honte ne fonctionnent pas. Un meilleur message pourrait être : « Ne vous étouffez pas lors d’un premier rendez-vous. Attendez qu’il y ait de la confiance, une communication claire, un consentement et une sécurité en place. »
Sources :
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